Critique littéraire / Pourquoi „Plus le monde se mondialise plus la terre se terrorise“ de Claude Frisoni est une fête de mots
Dans son nouveau livre „Plus le monde se mondialise plus la terre se terrorise“, Claude Frisoni jongle et joue avec les mots – il en résulte des aphorismes. Critique du livre.
Né à Knutange en 1954, Claude Frisoni est à la fois un homme de culture, d’écriture et de spectacle. Il fut notamment coordinateur général de Luxembourg, Capitale européenne de la culture 1995, directeur de l’Agence luxembourgeoise d’action culturelle puis directeur général du Centre culturel de rencontre Abbaye de Neumünster. Sans oublier la présidence du Théâtre ouvert Luxembourg (TOL) et de l’association des Amis de la maison de Victor Hugo à Vianden (AMVHV). Il est l’auteur de onze livres, dont l’avant-dernier, „Les exclus du festin“ (2023), sur des photographies de Raymond Reuter. Jules Didelot, quant à lui, est à la fois un dessinateur à ses heures perdues (auteur des illustrations accompagnant le texte) et le petit-fils de Claude Frisoni. Cette combinaison synesthésique met remarquablement en valeur les jeux de mots et autres facéties de la langue française présentes dans le présent volume.
Esprit subversif, es-tu là?
Dans la préface talentueusement ciselée, Frank Wilhelm, professeur émérite de l’Université de Luxembourg, également connu sous son nom de plume „François Guillaume“, rappelle que l’aphorisme est „une sentence énoncée en peu de mots – et par extension une phrase – qui résume un principe ou cherche à caractériser un mot, une situation sous un aspect singulier“. Ce genre littéraire spéculaire, qui vise plus l’alternative originale que la vérité, tend un miroir au lecteur en entendant attirer le „regard sur son propre mouvement de pensée“.
Comme d’autres auteurs francophones grands-ducaux (Edmond Dune, Claude Conter, tous les deux décédés) avant lui, Claude Frisoni, qui s’est illustré des années durant sur la scène dramatique, journalistique et littéraire luxembourgeoise, „aborde le monde, les êtres humains et leur société avec un esprit subversif“. Héritier en cela du „serio ludere“ (langage sério-comique inspiré du „spoudogeloion“ des Anciens, qui connaît une vogue inédite chez les Humanistes), d’un Voltaire, plume corrosive du siècle des Lumières, ou d’un Pierre Dac, l’inventeur de l’humour loufoque, Frisoni a l’amour du verbe et le travail sur la langue chevillés au corps. À l’instar de feu Raymond Devos, il est un ciseleur de mots ainsi qu’un jongleur de sens et de sons qui traque le faux et pourchasse l’infâme: „Dans cette farandole de mots certains se perdront, d’autres s’impatienteront, mais tous s’amuseront, (re)découvrant cette verve joyeuse avec laquelle l’auteur nous dit le monde comme il va“, résume Françoise Pirovalli, auteure de la quatrième de couverture.
Sagesse et dérision
Articulé en dix sections (de „À la guerre comme naguère“ à „Et l’amour dans tout ça?“, en passant notamment par „Et Dieu dans tout ça?“, „En vérité je vous le dis“ ou encore „C’est rien de le dire“), ce recueil d’aphorismes peut se lire de façon fluide et ponctuelle, au gré de l’humeur et des pages qui défilent, ou de façon plus systématique et raisonnée. Quels que soient l’approche et/ou le mode de lecture qu’il adopte, le lecteur constatera que chaque aphorisme, par sa concision et sa fulgurance, constitue une sorte de tremplin à la fois ludique et réflexif. Entre distance espiègle et réflexion vagabonde, Claude Frisoni cultive les mots d’esprit avec une effervescence raffinée et amusée (e.g. „Pourquoi la déforestation? Parce qu’un arbre, en fait, c’est un portefeuille“; „Mieux vaut avoir un compte en Suisse plutôt qu’un contentieux“; „Le Luxembourg est un étrange pays. Avec un seul Grand-Duc, pas de marquis ni de barons, mais des milliers de comptes.“), parfois virulente et caustique (e.g. „Sciences sans conscience n’est que ruine de l’âme. Mais si on retire science à conscience, que reste-t-il?“; „Des Juifs antisémites? Il y a bien des Égyptiens antiquaires“; „L’honnêteté est décidément le seul luxe que les riches ne peuvent pas se permettre“).
En définitive, en accumulant les plaisants paradoxes, les boutades malignes, les bagatelles piquantes et autres saillies drolatiques (si l’on reprend la liste que Jean Rochefort – dans le rôle du marquis de Bellegarde – dresse devant le baron Ponceludon de Malavoy – incarné par Charles Berling – médusé, dans le génial „Ridicule“ (1996) de Patrice Leconte), Claude Frisoni nous donne une belle leçon de persiflage dans une fête de mots et d’esprit minutieusement orchestrée.
- Das erwarten sich die Redakteure und die Winzerin vom neuen Projekt - 20. November 2024.
- Vom Ehemann betäubt, von Fremden vergewaltigt: Opfer sagt erstmals vor Gericht aus - 20. November 2024.
- Bauern protestieren weiter gegen Mercosur-Abkommen - 20. November 2024.
Sie müssen angemeldet sein um kommentieren zu können.
Melden sie sich an
Registrieren Sie sich kostenlos