Fraestreik / En finir avec la violence: Contre une société patriarcale
Plusieurs milliers de personnes ont manifesté hier en fin d’après-midi dans les rues de la capitale, en point d’orgue de la grève des femmes. Dirigée contre un genre ou contre un peuple, c’est la violence d’une même société patriarcale qu’a notamment dénoncée le cortège.
Pour la troisième année consécutive, la Journée internationale des femmes a pris hier la forme d’une grève, sur un modèle éprouvé en Suisse depuis de nombreuses années. Les femmes étaient hier invitées à réduire la cadence à domicile, en refusant les travaux domestiques et de soins qui occasionnent une charge mentale supplémentaire par rapport aux hommes moins souvent sollicités en la matière. Au travail, elles étaient invitées à travailler avec un peu de moins de zèle, à tenir une réunion sur cette thématique ou encore à manifester leur solidarité, par un badge, une affiche, une signature de courriel ou encore une playlist féminine.
Mais le point d’orgue de cette journée était le défilé parti de la gare à l’heure de la sortie des bureaux pour rejoindre sur les coups de 19.00 h la place d’armes plongée dans une ambiance jaune et bleue. Il n’y avait pas besoin de ces couleurs pour que le crime qui se passe à quelques milliers de kilomètres soit dans les têtes. Ni même que les liens entre féminisme et guerre soient examinés. En amont de cette journée, le message envoyé par l’association féministe russe, Feminist Anti-War Resistance, avait largement circulé dans les milieux féministes internationaux. „La guerre est synonyme de violence, de pauvreté, de déplacements forcés, de vies brisées, d’insécurité et d’absence d’avenir. Elle est inconciliable avec les valeurs et les objectifs essentiels du mouvement féministe. La guerre exacerbe les inégalités de genre et fait reculer de nombreuses années les acquis en matière de droits humains. La guerre apporte avec elle, non seulement la violence des bombes et des balles, mais aussi la violence sexuelle: comme l’histoire le montre, pendant la guerre, le risque d’être violée est multiplié pour toutes les femmes“, disait-elle.
C’est d’ailleurs une bannière „Feminism against war“ qui ouvrait le cortège et sur le refrain de „solidarité avec les peuples du monde entier“, que ce dernier est arrivé bon port. Syndicaliste de l’OGBL, membre de la plateforme JIF, Michelle Cloos faisait le lien entre violence domestique et violence militaire. „La violence est un phénomène d’un certain type de société, notamment patriarcal, et est la conséquence de décennies et de siècles de persistance d’une certaine façon de communiquer, de percevoir la masculinité, la force, le dialogue.“ C’est pourquoi des mouvements féministes à l’international défendent l’idée que dans le cadre des conflits il n’y ait pas seulement des États belligérants qui s’assoient à la table des négociations de paix, mais aussi que la société civile, et donc de mouvements de femmes, y soient conviées à réfléchir aux conditions d’une sécurité future. „On doit se séparer de visions par lesquelles le compromis et le dialogue sont perçus comme faibles. Alors que le dialogue, c’est la force“, estime la syndicaliste.
„La guerre est la meilleure arme du patriarcat qui lui n’est rien d’autre que l’expression d’une domination masculine abjecte. Celle qui veut conquérir, assiéger et exploiter par la force les êtres humains et la nature“, a pour sa part tonné la conseillère communale „déi Lénk“ d’Esch-sur-Alzette, Line Wies, lors d’une intervention en fin de cortège. „Le patriarcat est une force destructrice qui n’a pas de sexe, car des femmes qui font la guerre et qui brisent des vies, ça existe aussi“, a-t-elle tenu à préciser.
Après avoir proclamé la solidarité du mouvement avec les „sœurs de combat qui subissent la guerre, partout dans le monde“, la militante a prié le gouvernement de „donner une suite favorable à toutes les demandes d’asiles des réfugié.e.s de guerre, indépendamment de leur pays d’origine, de leur statut social et de leur couleur de peau“, mais aussi „de ne pas jouer les jeux des faiseurs de guerre, de l’OTAN et de l’industrie militaire qui pousse vers plus de dépenses publiques en matière d’armement.“
C’est ensuite sur la violence domestique qu’elle a poursuivi son discours. Elle a notamment demandé que le gouvernement suive l’exemple italien en inscrivant le féminicide dans le code pénal. Ce serait un moyen pour reconnaître les violences faites aux femmes et fondées sur le genre comme des violences spécifiques et cela permet également une prise de conscience du problème. „Les violences envers les femmes ne se limitent pas à des harcèlements sexuels, viols et féminicides“, avait expliqué en amont la JIF, en mentionnant la gynécologie et l’obstétrique comme des sources de violences dénoncées par de plus en plus de femmes.
Pour un congé de naissance
Les conditions de travail, le logement et le congé de naissance étaient les trois autres grandes thèmes de la mobilisation. Milena Steinmetzer, pour l’OGBL, a défendu une réduction de temps de travail avec maintien du salaire. Les gains de productivité grâce à la digitalisation de l’économie le permettent. Les retombées positives en termes de santé psychique et de qualité de vie l’exigent. Si la différence de salaire n’est que de 7%, les différences dans le temps de travail ont des conséquences sur les carrières qui se répercutent dans des inégalités sur la pension de 42% en défaveur des femmes. Mais cela ne va pas non plus sans une revalorisation des salaires des professions traditionnellement assignées aux femmes, comme ceux du secteur du nettoyage et de commerce. Cela pourrait s’atteindre par la transparence grâce à la signature de conventions collectives prévoyant une grille de salaire progressive et par des moyens et compétences donnés à l’Inspection du travail et des mines pour contrôler et sanctionner ces discriminations au travail.
Jessica Lopes pour l’ASTI a abordé la question du logement. Elle a fait remarquer qu’entre 2010 et 2020 les prix du logement ont augmenté trois fois plus vite au Luxembourg que dans le reste de l’UE. Cette évolution touche davantage encore les femmes, parce qu’elles sont moins bien payées que les hommes, ont en conséquence plus de difficulté à constituer une épargne et moins de sécurité financière. Elles constituent de surcroît 93% des familles monoparentales souvent exposées au risque de pauvreté. Les femmes sont aussi discriminées dans l’accès au logement. Les propriétaires leur préfèrent les hommes. Il faudrait en conséquence faciliter l’accès au logement, que ce soit en inscrivant la garantie d’un logement abordable et décent dans la constitution et instaurer un système de candidature neutre sur le marché du logement (sans nationalité et sans sexe), une aide simple et rapide pour les familles monoparentales et femmes victimes de violences domestiques ou encore une mobilisation forcée des terrains détenus par les communes pour la création de logements abordables. Cela est d’autant plus crucial pour les victimes de violences domestiques qui doivent fréquemment choisir entre précarité et violence. „Ces femmes doivent compromettre leur indépendance et rester dans des situations qui ne les rendent plus heureuses ou pire qui les mettent en danger parce qu’elles n’arrivent pas à se loger seules. Dans les cas les plus extrêmes, le choix est entre la violence et la rue.“
Enfin, la plateforme JIF a demandé l’introduction d’un congé de naissance de trois mois pour le père, directement après la naissance, pour aider des femmes dans une période éprouvante. Il faudrait qu’il soit obligatoire, pour contraindre les pères à s’investir plutôt que de préférer leur carrière. Charles Vincent attend un message fort du gouvernement du genre : „Non. Dix jours après que votre femme a donné naissance à votre enfant, vous n’avez rien de mieux à faire que de soutenir sa convalescence. Votre carrière peut attendre quelques semaines.“ Il s’agirait d’un congé de trois mois rémunéré à temps plein et obligatoire. Ce serait donner aux pères la possibilité de „réinventer leur masculinité“, dans un sens plus favorable aux femmes.
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a wéi ass et mat den „hommes battus“.Dovun schwetzt keen.
Iwerjens sollen déi Dammen déi esou haart jeitzen,vleicht een tour an Syrien oder Afghanistan machen.