Affaire du plagiat du mémoire de Xavier Bettel / L’œuvre d’un étudiant moyen
Embarqués dans la même galère avec l’affaire du plagiat du mémoire de DEA, le premier ministre Xavier Bettel et son directeur de mémoire Etienne Criqui, ont laissé entendre que le plagiat était une pratique tolérée à la fin des années 90. Deux anciens étudiants de la fac de droit de Nancy admettent, chacun à leur manière, le contraire.
Après que Reporter.lu a révélé que son mémoire de DEA droit public et sciences politiques présenté en 1999 était en grande partie du plagiat, le premier ministre Xavier Bettel a semblé vouloir renvoyer à son époque plutôt qu’à lui-même la responsabilité de ses écrits. „Du point de vue d’aujourd’hui, je reconnais qu’on aurait pu – oui, peut-être qu’on aurait dû – le faire autrement. Je fais pleinement confiance à l’Université de Nancy pour évaluer si l’œuvre en question répond aux critères de l’époque.“ Son directeur de mémoire Etienne Criqui, lui a emboîté le pas en déclarant notamment au quotidien français Libération qu’en 1999, c’était „plutôt habituel de récupérer des passages à gauche et à droite“, sans citer les sources. „Nous ne l’avons pas explicitement demandé à nos étudiants, mais ça se faisait plus facilement dans le dernier siècle qu’aujourd’hui“, a-t-il ajouté. Par de tels propos, c’est non plus seulement sur un ancien étudiant et son enseignant, mais aussi sur une génération d’étudiants et une université, que l’affaire semble jeter le discrédit. Les étudiants passés par les bancs de la fac de Nancy peuvent aider à démêler le vrai du faux.
„C’était monnaie très courante“
Quand il repense à ses études, Karim Soler se souvient de Xavier Bettel comme d’un étudiant éloquent, fort en relations publiques, très occupé par la politique et plutôt moyen dans ses études. Cet avocat au barreau du Luxembourg depuis 2002, n’émet guère de doute quant à la possibilité d’un plagiat, tant la pratique lui semblait courante à l’époque, pour la plus grande partie des étudiants à laquelle tous deux appartenaient. „Je ne côtoyais pas le haut du panier. Je n’étais pas le meilleur étudiant. Je dirais que sur 25 en DEA, il y en avait 20 qui plagiaient. On s’aidait entre nous.“
Même l’ampleur, seules deux pages sur 56 exemptes de plagiat, dont le taux s’élève à 96%, peine à le faire bondir. „C’est un peu énorme“, dit-il. „Mais en soi, ça ne me surprend pas. Car il y a vingt ans, c’était plus facile. Et, moi, le premier, on a tous fait de la même manière. Après, peut-être pas autant.“ Karim Soler décrit des méthodes d’un autre temps. „Il suffirait de prendre un mémoire de DEA d’un étudiant de Montpellier. Le prof n’avait aucune possibilité de le savoir. Vous pouviez prendre un sujet dont vous saviez qu’un ami ou un cousin avait fait à Lyon le même. On reprenait des bouquins, on recopiait mot pour mot“, dit-il. „Le plagiat était monnaie très courante. Il n’y avait aucune chance d’être pris sauf si le professeur avait connaissance du livre, qu’il avait un soupçon et prenait le bouquin.“ Lui-même estime à 50% le taux de plagiat de son mémoire de DEA et se rappelle avoir repompé à plus de 90% un travail de licence consacré à la préférence nationale sur les droits de vote en France. L’absence d’outils de détection rendait les choses faciles. Même si le copier-coller manuel était fastidieux. „J’ai pris autant de temps à recopier à la main que si j’avais pensé tout seul“, s’amuse-t-il.
Le diplôme de DEA n’était pas utile pour poursuivre les cours complémentaires au Luxembourg. La maîtrise suffisait. En France, il permettait toutefois d’être dispensé de la note d’analyse au concours d’avocat. Le DESS, davantage tourné vers la pratique, dispensait de l’étude de cas. Le mémoire de DEA était certes censé être „un travail en principe personnel“. Mais, dans les faits, c’était autre chose. La faute revient également à la matière. Le droit repose toujours sur des concepts déjà forgés. „C’est toujours un travail sur base d’anciennes doctrines. Vous prenez toujours fait et cause pour une pensée, mais vous n’êtes pas la personne qui inventait.“ Cela explique aussi la profusion de publications et de doctrine, qui rend un plagiat plus facile à cacher.
Karim Soler en profite pour dénoncer l’omerta qui règnerait sur la prétendue difficulté des cours de droit. „C’est assez bizarre comme matière. Vous pouviez réviser une semaine avant les partielles ça passait. En réalité, le droit n’est pas une matière compliquée.“ Et le plagiat la rendait encore plus facile. Il était „un usage des étudiants, et pas des meilleurs, mais de ceux qui étaient enclins à ne pas trop travailler, comme moi et comme lui du coup“, résume-t-il. Lui qui a étudié aussi à Paris et à Lyon estime que la pratique était généralisée, et non pas attachée à une ville universitaire en particulier. Mais, il n’irait jamais dire que c’était un usage permis par le corps professoral.
L’avocat met en garde contre tout anachronisme qui voudrait regarder hier avec les yeux d’aujourd’hui. S’il estime qu’il est normal de mener la discussion sur le sujet, il ne voit pas pourquoi il faudrait réserver des conséquences à cette affaire vieille de vingt ans. Il estime que face à de telles révélations, il faut être sincère et ne pas minimiser. Il s’imagine confronté à la situation: „Je ne serais pas forcément gêné, car je resituerais cela dans l’époque. J’ai moi aussi été critique envers des gens. Mais quand vous êtes concerné par le sujet, vous vous rendez compte qu’il y a une réalité à décrire.“
„C’est grave dans tous les cas“
Emmanuel Vannini prend le sujet avec davantage de gravité. Son témoignage laisse entendre que ce n’est pas l’ensemble de la faculté de droit, ni l’ensemble des étudiants qui est visé dans cette affaire. Cet avocat au barreau de Luxembourg et enseignant était sur le campus au même moment que Xavier Bettel, sans l’avoir fréquenté ni y avoir passé autant d’années que lui sur place. Il a été choqué par l’ampleur du plagiat, tout autant que par le plagiat lui-même. „On a toujours entendu parler de certains mémoires qui pouvaient être utilisés pour d’autres mémoires ou pour des thèses, et que des étudiants pouvaient s’en sortir comme ça. Ce n’est pas quelque chose de radicalement nouveau.“
Détecter un plagiat n’était pas simple. Les professeurs ne pouvaient s’en rendre compte que si l’étudiant allait chercher des extraits d’ouvrage connus. „Avant le jour de la soutenance, il devait s’apercevoir si quelque chose cloche, est trop écrit, ne correspond pas au style de l’étudiant et n’est pas mis entre guillemets.“ Mais si l’étudiant était plus malin, il passait facilement entre les gouttes. „A l’époque il était plus difficile pour les membres d’un jury et le professeur en charge du mémoire de vérifier si l’étudiant était allé récupérer des données ailleurs, voire s’il avait intégralement repris un mémoire quand celui-ci est inconnu au bataillon“, convient-il. Si tu allais chercher un obscur mémoire d’un étudiant dans une autre université, voire même à l’étranger, c’était quasiment impossible de savoir que le mémoire était plagié.“
Quand j’ai fait mon mémoire de DEA à la faculté de droit à Nancy en 1995, on exigeait de ma part de faire des recherches, de les justifier par des citations et des notes de bas de page, et sur cette base-là, de faire ma propre analyseavocat et ancien étudiant de la faculté de droit à Nancy
Ce qui est étonnant dans l’affaire du mémoire de Xavier Bettel, c’est que celui-ci ne semble pas correspondre au plagiat indétectable. L’absence de notes de bas de page, indiquée par le journaliste Pol Reuter qui a découvert le plagiat, aurait dû mettre la puce à l’oreille. „Comment un directeur de mémoire, une université, peut laisser un mémoire sans note de bas de page, ce qui laisserait entendre qu’il n’y a pas de recherche en amont?“, se demande Emmanuel Vannini. Car si, en vingt ans, la traque du plagiat a été facilitée par les logiciels capables de les détecter, les exigences n’ont pas changé. „Quand j’ai fait mon mémoire de DEA à la faculté de droit à Nancy en 1995, on exigeait de ma part de faire des recherches, de les justifier par des citations et des notes de bas de page, et sur cette base-là, de faire ma propre analyse“, explique l’avocat. „On nous a fixé des directives très claires, en termes de forme, nombre de pages à respecter, police d’écriture, mais également des consignes quant au fond, à savoir que toutes nos sources devaient être mises entre guillemets avec une référence en note de bas de page et une bibliographie qui va avec. Ça a toujours été pour moi la base de référencer les sources que j’utilise.“
L’ex-étudiant se souvient qu’on pouvait tout de même craindre d’être pris. „Outre le directeur de mémoire, il y avait trois autres professeurs participant à mon jury. Chacun avait reçu un exemplaire de mon mémoire, disposait d’un certain délai pour le lire et me posait des questions le jour de la soutenance.“ C’est ainsi autant la peur que le souci de respecter les règles du jeu qui ont fait que l’avocat a renoncé au plagiat. „Il y a toujours eu dans le système universitaire, des étudiants qui passaient entre les mailles du filet et arrivaient à rendre le mémoire sans avoir fait de travail de recherche, en plagiant.“
On ne peut pas dire que le mémoire de DEA était un mémoire bis, qu’on faisait à la va-vite. Le principe même du DEA était de terminer l’année par une soutenance. C’était le seul mémoire à l’époque qu’un étudiant de droit était amené à faire avant une éventuelle thèse. La maîtrise n’était composée que de partiels. Emmanuel Vannini s’étonne que l’Université de Lorraine ait pris la peine de souligner que ce travail ne comptait qu’un tiers de la note du DEA. Il fait ses calculs: „Un tiers de la note, c’est énorme. Si on part du principe qu’un devoir plagié, c’est zéro. Ça veut dire pas de DEA.“ Par contre, il ne voit pas pourquoi il serait plus inacceptable pour un étudiant de droit de ne pas observer les droits d’auteur. „Pour moi, on est sur des questions d’exigence universitaire. Juriste, géographe ou ce qu’on veut. Il y a des consignes données par les universités, qu’il s’agit de respecter. C’est grave dans tous les cas.“
On plagiait. Il n’était pas le seul. Les profs n’étaient pas d’accord. C’était un usage des étudiants. Pas celui des meilleurs, mais de ceux qui étaient enclins à ne pas trop travailler, comme moi et comme lui du coup.avocat et ancien étudiant de la promotion de Xavier Bettel
„Cela ne pouvait pas passer“
Aujourd’hui professeur émérite de l’Institut des Hautes études internationales à Paris II, Gérard Cahin est devenu docteur en droit public à la faculté de droit de Nancy en 1998. Il y était maître de conférences les deux années suivantes. Et, pour lui, il n’est pas concevable de laisser le moindre doute sur les exigences auxquelles devaient faire face les étudiants des années 90. „Les étudiants de DEA ou master savaient déjà très bien qu’il fallait citer ses sources, sans doute d’une manière moins exigeante qu’aujourd’hui où toute citation doit être référencée, mais pomper des textes entiers sans référence, ça non, cela ne pouvait passer.“
La détection du plagiat était un réel souci. Gérard Cahin se rappelle justement l’époque: „J’étais en 2000 au jury d’une thèse pour laquelle l’autorisation de soutenir a été refusée par la présidence de l’université pour plagiat. Le vrai problème, qui atténue la responsabilité du directeur de mémoire, qui n’est pas une thèse, est la difficulté à l’époque de repérer le plagiat quand il porte sur des documents officiels et non sur d’autres travaux universitaires mieux connus. Que tel ou tel enseignant soit moins vigilant ou scrupuleux que d’autres, compte au surplus tenu des moindres facilités à détecter le plagiat, ne change rien aux règles élémentaires de la recherche universitaire ou scientifique en vigueur en 1999“, confirme-t-il.
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Restons serieux…les profs d universite sont aussi des hommes qui preferent passer une soiree agreable avec leur amie au resto plutot que d examiner au fond des travaux moyens emanant d etudiants moyens.
A l epoque ou le moteur de recherche permettant de trouver sans effort un plagiat en quelques minutes n existait pas,personne ne se donnait la peine de chercher longtemps pour eventuellement trouver une anomalie.
Moi et des milliers d’étudiants peuvent vous assurer le contraire: 96% de plagiat n’a jamais été toléré.. jamais! Et celui qui prétend le contraire est un menteur!
stellt sech d´Fro, wien nach eng deck Rechnung mam Här Bettel op hat? De Journalist vun Reporter.lu bestemmt net. Hat hien net en Tuyeau krit vun engem Pensionär den mat onschelleger Mine zu Capellen mam Mup spazeieren get. Dem alen Fuss geif ech dat zoutrauen. Ech lache mech freckt bei dem Gedanken.
Kuck un, elo op eemol soll Plagiat dat Normalste vun der Welt sinn. Witzeg.
„Some rise by sin and some by virtue fall.“
„Einige steigen durch Sünde auf, andere fallen durch Tugend (Rechtschaffenheit)“.
(Shakespeare)
MfG
Robert Hottua
…..dem Här Aulner sein Artikel op RTL.lu net mei erem. 🧐 Kann en mer soes wou den as? As dem Här Aulner neischt passeiert? Mus en sech Suergen machen?🤭
Armutszeugnis für die Université de Lorraine!!
Plagiat an Oneierlechkeet passt an eis Politik.
Aus dem Titel des zu kommentierenden Artikels ist zu schliessen dass Herr Bettel ein mittelmässiger Student gewesen sein musste, der heute , also mehr als 20 Jahre später eines Plagiats für schuldig befunden wird. Dieses seit vielen , vielen Jahren verjährte , erst heute aufgedeckte „ Schwer- Verbrechen“ wird dem Universitär und früheren Bürgermeister der Hauptstadt Luxemburg und seither Premier Ministre und Regierungschef des Grossherzogtums keinen Zacken aus seiner verdienten Krone reissen , im Gegenteil !
Denn wenn wan man bedenkt , dass unser demokratisch absurdes Wahlsystem jedem mit oder ohne jegliches Zertifikat noch Diplom eines Kindergarten und anderer Primär-Sekundär- und Unis erlaubt die allerhöchsten Gemeinde- und Staatsämter zu bekleiden……..dann ..Gare la mine !!!
Da seit Menschengedenken alles , u.a.m. Uni- Doktor-und Adelstitel inbegriffen gekauft wurden und noch werden , müsste man sich so seine Gedanken machen und vielleicht etwas mehr relativieren…oder ?
Bitte lesen sie Me Vogels Brief ans LW vom 28.10. Spricht Bände.
Wurde an dieser Stelle leider nicht veröffentlicht.
Sie finden den Leserbrief von Gastton Vogel auch bei uns:
https://www.tageblatt.lu/headlines/les-fouilleurs-de-poubelles/
Beste Grüße aus der Redaktion