Au Cercle Cité / Regards inédits sur la ville de Luxembourg à travers des photographies
Chaque année, la Photothèque de la ville de Luxembourg emprunte au Cercle Cité l’espace d’exposition Ratskeller pour présenter une partie de sa collection de quelque 8 millions de photographies. Pour le 34e exercice du genre, elle propose d’observer le passé de la capitale à travers des photos inédites.
C’est un cabinet de curiosités photographiques que nous offre la Photothèque de la ville de Luxembourg avec son exposition annuelle au Ratskeller. Tandis que l’année dernière, on pouvait admirer la manière dont le fameux Pol Aschmann croquait les gens de la rue, elle nous montre cette fois comment des photographes moins fameux et souvent amateurs ont porté leur regard sur la ville et des fragments de sa vie quotidienne. A vrai dire, on retrouve ci et là des tirages de photographes connus issus de fonds plus petits que ceux des Tony Krier et Edouard Kutter. Mais ces fonds modestes, ce sont surtout ceux de collectionneurs privés et de photographes inconnus du grand public. „Bien que de taille modeste, ces ‚petites collections’ sont loin d’être insignifiantes. Elles recèlent des trésors photographiques et contribuent de manière décisive à la valeur documentaire et artistique des archives de la Photothèque“, prend soin de souligner Gaby Sonnenabend, qui a récemment pris la tête de l’institution, dans la préface du catalogue.
Il y a beaucoup de manières de vivre cette exposition tant les angles et les perspectives sont variés. Pour ce qui est de l’évolution de la ville, on pourra l’éprouver de différentes manières, tant l’exposition témoigne de la révolution urbanistique et des usages de la ville qui nous éloigne de ces images. C’est avec circonspection qu’on se rend compte des ravages de la pression immobilière ou les ravalements esthétiques douteux. Ainsi, le magnifique garage Peusch qui faisait l’entrée de la ville au niveau de la place de l’Etoile est-il donné à voir dans sa splendeur d’antan. On regarde par contre sans nostalgie les photographies qui nous rappellent une époque où les voitures pouvaient s’enfoncer dans la Grand-rue, sur les places d’Armes et Guillaume.
On pourra faire le constat, en considérant la magnifique photo d’une démonstration de plongeon dans l’ancienne piscine en plein air du Grund, ou encore celle de patinage sur la piscine gelée de „Gantenbeinsmühle“ qu’en certains points, et en l’occurrence en termes de point d’eau, les habitants d’alors étaient mieux lotis que les habitants de „la ville cosmopolite, conviviale et moderne“, évoquée par la bourgmestre Lydie Polfer en préface.
Il y en a pour tout le monde
L’exposition est d’un intérêt pour tous. Les visiteurs locaux, souvent, cherchent avec entrain des figures et ambiances familières sur les photos de la deuxième moitié du XXe siècle. Les visiteurs étrangers, et ils sont nombreux à s’y arrêter, peuvent redécouvrir sous un nouveau jour les motifs de leurs propres photographies en considérant les panoramas sur la ville, la Corniche ou encore la vue sur la vallée de la Pétrusse avant la construction du Pont Adolphe. Sur une vue plus en aval encore de la vallée de l’Alzette, ils retrouvent même leurs prédécesseurs derrière l’objectif, un siècle plus tôt, en train de goûter un art pas encore devenu populaire. Sur l’intrigante photo de la collection René Naegelen dont il s’agit on croit observer à l’œuvre les membres du Photo club luxembourgeois créé en 1909 en train de s’exercer aux abords du Grund.
On retrouvera en plusieurs endroits des visages d’ouvriers, comme ceux du chantier du siège des CFL, qui, vissés sur leur échafaudage, ont un instant arrêté leur travail pour observer le cortège du roi des Belges. Un cliché pris en 1968 à Neudorf nous rappelle qu’il n’y a pas si longtemps que cela, les catholiques organisaient des prières de rues comme on ne le laisserait pas faire aujourd’hui à d’autres religieux.
On retrouve aussi des motifs atemporels comme ce train qui traverse le Pfaffenthal suspendu à son viaduc et répandant un dense panache de fumée sur son passage. On mesure l’influence des grands photographes humanistes comme sur cette photo caractéristique d’un enfant accroché à la grille d’un ministère au début des années 50. Et on recroise aussi des motifs moins attendrissants comme ce gibier, chevreuil et lapins confondus, entassé devant un magasin, image qui aujourd’hui horrifierait les enfants, les végétariens comme les contrôleurs de l’hygiène.
L’exposition aborde ainsi de nombreux aspects de la vie économique et sociale, du début du XXe siècle jusqu’aux années 90. La raison tient notamment au fait que la Photothèque a voulu ainsi remercier ses donateurs. Néanmoins, durant la visite, revient souvent l’idée et l’envie qu’une exposition du genre se concentre sur une seule thématique ou sur un motif qui serait décliné à travers les décennies (par exemple les loisirs, le commerce, les faits divers, les animaux, les enfants, la nuit, le jour). Ce serait sans doute abandonner le critère esthétique des photographies pour mieux se pencher sur leur valeur informative ou leur valeur affective, en présentant aussi bien les photos moyennes sinon ratées que les réussites involontaires, les ruptures des conventions et les pas de côté qui font toute la saveur et la spécificité de la photographie amateur.
Infos
Jusqu’au 18 septembre 2022
Du lundi au dimanche de 11 à 19 h
Ratskeller, Cercle Cité, entrée: rue du Curé
Entrée libre
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