Johny Fritz à la BNL / Un touche-à-tout musical
Compositeur, musicien et collectionneur, Johny Fritz fut et est tout à la fois. L’exposition que lui consacre la Bibliothèque nationale de Luxembourg passe en revue son œuvre comme son intérêt particulier pour Erik Satie.
C’est à une exposition inhabituelle que convie la Bibliothèque nationale du Luxembourg depuis la semaine dernière. Celle-ci tourne autour d’un compositeur bien vivant, avec la complicité duquel l’événement fut préparé: Johny Fritz. C’est en fait une nouvelle étape dans une relation étroite entre le musicien et l’institution, entamée en 1984 quand il a présenté ses „Drei Skizzen für Solo-Klarinette“ dans la salle Mansfeld, première œuvre de son répertoire composé en 1967, inspirée par Igor Stravinsky. Le concert avait lieu dans le cadre du premier festival organisé par la „Lëtzebuerger Gesellschaft fir nei Musék“ (LGNM), fondée l’année précédente.
Johny Fritz était l’archiviste de cette société qui voulait soutenir les compositeurs qui voulaient dépasser la musique romantique classique. Le compositeur Alexander Müllenbach en était l’architecte, lui qui, dans une interview de 1978 relevée dans le catalogue de l’exposition, déplorait l’atonie de la vie culturelle par ces mots: „D’où peut nous venir cette communication, ces influences, cet enrichissement, s’il n’y a qu’une demi-douzaine de compositeurs dans le pays et qui voient chacun quotidiennement les mêmes murs, les mêmes clochers, les mêmes petits problèmes provinciaux?“ La LGNM aura apporté une contribution notable à la vie culturelle et notamment avec Johny Fritz comme curateur d’expositions à la BNL – sur Alban Berg en décembre 1985 et sur Erik Satie l’année suivante.
De Satie à Machaut
L’exposition, pensée par la musicologue et spécialiste de Laurent Ménager, Marlène Duhr, éclaire Johny Fritz sous ses différentes facettes. Le natif d’Aspelt, fils d’un amateur invétéré de musique et petit-fils d’un dirigeant du „Musikverein“ d’Aspelt dans lequel il allait commencer à faire ses gammes, s’est, dès les années 60, intéressé à de nouvelles formes de compositions et à des méthodes alternatives de notation qui allaient entre autres se cristalliser par la réalisation de ses „Mondrianophonien“ en 1973, manières de retranscrire la musique sous formes de rectangles unicolores.
À cette époque, Johny Fritz est déjà devenu un collectionneur avisé de documents du musicien français fin-de-siècle, Erik Satie. Dans les années 60, il a découvert ses „Gymnopédies“, mais par la suite, c’est, autant que son œuvre, la vie de ce musicien proche des dadaïstes et du pionnier de la nouvelle musique, Claude Debussy, qui l’intéresse. Et il entre dans les réseaux de collectionneurs et accumule les documents sur Erik Satie et la bohème parisienne. L’exposition montre quelques exemplaires des 94 lettres du musicien natif d’Honfleur qu’il possède. Dans une reconstitution de la chambre d’Erik Satie, égale à celle que s’est offerte chez lui Johny Fritz, on découvre la manière dont ce dernier a dialogué avec, sinon enrichit, l’œuvre de Satie
En 1986, Johny Fritz a organisé un festival dédié à Erik Satie. C’est trois ans plus tard que fut fondé à la BNL le „Centre d’études et documentation musicales“ (CEDOM) en charge de réunir et cataloguer les partitions et enregistrements des musiciens du pays. L’exposition consacrée à Johny Fritz s’inscrit dans une volonté de l’institution culturelle de continuer à être et de signifier qu’elle est un lieu où l’on joue de la musique. Le vernissage de l’exposition fut d’ailleurs l’occasion de jouer l’œuvre „Images en mouvement pour flûte, clarinette et harpe“ composée sur commande de la société „Noise Watchers Unlimited“ de Claude Lenners, avec le soutien du ministère de la Culture.
L’exposition comporte aussi une présentation de différents instruments et pièces musicales composées par Johny Fritz. Son œuvre reste marquée par son intérêt pour la musique médiévale et de la Renaissance qui a commencé dans les années 70. Celui qui était devenu professeur de clarinette et de flûte à bec au Conservatoire de Luxembourg a participé à la promotion de ce corpus musical en créant le groupe Tempus iest iocundum. Et c’est dans ce cadre surtout qu’il a développé une grande collection d’instruments, faisant notamment réaliser un organistrum sur le modèle de celui à la cathédrale de Saint Jacques d Compostelle. Cet instrument, utilisé en 1995 à l’église Saint Michel pour l’interprétation de la „Messe de Notre-Dame de Guillaume de Machaut“, „résultat de vingt années d’expérience et de recherches“ est visible dans l’exposition. Tout comme on peut écouter la pièce ainsi que cinq autres pièces dans une cabine audio.
Infos
Jusqu’au 25 mars 2023. Du mardi au samedi de 10 à 19 h. Visite guidée en présence de la curatrice Marlène Duhr, les 28 octobre (L), 15 novembre (D), 15 décembre (F), 28 janvier (E) et 18 février (L).
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