Critique de film / Chute fatale : „Sur les chemins noirs“ de Denis Imbert
Librement adapté du roman éponyme de Sylvain Tesson, „Sur les chemins noirs“ montre un homme traverser la France en n’empruntant que les chemins les plus escarpés et les plus solitaires. Durement touché par une vie dissolue, un accident grave et des problèmes de santé, l’écrivain-aventurier, un homme accablé qui n’aura de cesse de se relever, toujours et encore, trouve dorénavant tout son bonheur loin des hommes, „en compagnie de la seule maîtresse qui ne vous trompe jamais: la liberté“.
Ce sont de telles grandiloquences, notées par l’aventurier sur un calepin et lues à voix-off par un Jean Dujardin dont la cicatrice dénote une vie durement vécue, qui accompagnent des vues montagnardes splendides, façon „Le Otto Montagne“, dans un film qui rappelle les tableaux d’un Caspar David Friedrich ou les propos des romantiques sur la solitude de l’homme au beau milieu d’une nature hostile.
Egrenant les clichés, le film recompose, à coups de déclencheurs mnésiques pseudo-proustiens, la vie dissolue d’avant l’accident, où l’aventurier pose en mondain zélé, qu’on voit draguer tout ce qui bouge et signer des bouquins, quand il ne fait pas les deux à la fois: lors d’une séance dédicace, sa future partenaire – qui le quittera évidemment, parce qu’il aime plus la vie dangereuse que leur couple – lui demande ce qui lui a le plus manqué lors de ses expéditions, à quoi il répondra, sans que cette remarque soit ironique et sans que le réalisateur ne paraisse la condamner: „Ce qui m’a peut-être plus manqué là-haut, c’est vous, Mademoiselle.“
Bref, le film s’empêtre, à la fois dans ses analepses que dans le présent du récit, dans des scènes éculées, ce qui est d’autant plus dommage que, dans de rares moments où il montre et commente la désertion de la campagne, se dessine en creux un tout autre film, qui aurait pu se faire si Imbert s’était résolu à s’éloigner un peu de son personnage central aussi plat que les montagnes qu’il escalade ne le sont pas.
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