Cinema / Déambulations amoureuses: „Zeréck“ de Frédéric Zeimet
Sorti il y a une semaine en salles, le moyen métrage „Zeréck“ de Frédéric Zeimet se présente comme la première comédie romantique luxembourgeoise. Il est en tout cas une balade nocturne légère et sincère entre deux vieilles connaissances et entre deux quartiers (Grund et Kirchberg).
La première comédie romantique luxembourgeoise! C’est un slogan qui frappe fort et interpelle au point où on pourrait se demander si la lacune ainsi comblée n’est pas la preuve d’un malaise entre le pays et un sentiment dont la pudeur interdirait de parler. Le film n’apporte pas de réponse. Après les 49 minutes savoureuses que compte „Zeréck“, on se demande vraiment pourquoi le genre n’avait pas encore fleuri sur le territoire, et notamment dans cette vieille ville de nuit qui est la première bonne pioche du casting.
Des déclarations d’amours à la vieille ville, il y en a eu bien davantage que de comédies romantiques, à considérer tous les peintres qui ont immortalisé les contours. „Zeréck“ leur rend un hommage cinématographique. Frédéric Zeimet fait démarrer son ébauche de romance à l’entrée de l’abbaye de Neimënster, lorsque Camille (Dorothée Neff) et Thomas (Konstantin Rommelfangen) sortent du mariage de l’ex-petit ami de la première et frère du second. Les deux se connaissent, mais ne sont plus en bons termes. Camille, femme pétillante et sur la défensive, est en position de faiblesse. Elle vient de clore avec fracas un chapitre amoureux de sa vie. Thomas apparaît comme un homme sûr et conquérant.
Rentrés exceptionnellement au pays pour célébrer ce mariage, ils logent tous les deux dans le même hôtel du Kirchberg, à deux pas de la place de l’Europe, et vont y rentrer ensemble, puisqu’aucun taxi n’est disponible. Du Grund jusqu’au Kirchberg, les deux monteront le Breedewee, emprunteront la Corniche pour remonter dans la Ville Haute par la place du théâtre et gagner de là le Pont rouge, puis la place de l’Europe. Les grands espaces et les vieilles pierres, la nuit, l’hiver, les rues désertes, tout invite les deux âmes au rapprochement et aux confessions.
En quête de l’éternel retour
Le chemin du retour est ralenti par la blessure que contracte Thomas au début de leur dérive. Et le retour comme la blessure se conjuguent aussi au passé. Les déambulations vont permettre aux deux compagnons d’infortune de parler d’amour vrai, de regrets et d’erreurs de jeunesse. L’assurance de Thomas se révèle rapidement le paravent d’une timidité ancienne, capable de faire fléchir Camille.
„Zeréck“ a l’originalité de capter ce moment de la rencontre où les corps ne font encore que se frôler, où tout est possible, dans un emballement de l’instant présent. Il nous laisse habilement à la fin du parcours, à l’orée d’une romance. Les deux personnages n’avaient d’ailleurs pas nécessairement besoin de s’être connus et l’idée de cette déambulation dans la ville déserte aurait pu accoucher d’autant de récits qu’il y a de cultures et de possibilités de rencontre dans la métropole luxembourgeoise.
Le film sort au bon moment sur les écrans. Il se prête particulièrement bien à la période introspective de Noël. Il n’y a dans ce film pas que l’image, qui est réaliste, mais aussi le fait qu’il a été tourné par un froid de canard, en plein confinement, avec des équipes techniques décimées par les virus et un budget très limité, ce qui fait de ce moyen métrage de 49 minutes, emmené par une bande-son délicate composée par Daniel Balthasar, un véritable rescapé. Son réalisateur, lors de la première, assurait, inquiet, qu’il était permis de ne pas aimer son film, ce qui aurait été un comble pour une comédie romantique. Mais „Zeréck“ est un film honnête, entraînant, et qui invite ses spectateurs à ouvrir les bras à l’amour. S’il ne triche pas, c’est peut-être aussi parce qu’il est biographique, le coscénariste de „Doudege Wénkel“ et réalisateur de la plus récente websérie „W“, Frédéric Zeimet, ne cache pas que c’est l’amour qui l’a retenu au pays. „Zeréck“ est en ce sens aussi un retour d’ascenseur.
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