Festival de Cannes / Et si c’était niais
„Quand on est enfant, le monde entier paraît un conte merveilleux. Dans le mien, le prince, c’était mon père.“ Alors que la voix off de Dylan Penn, fille de Sean Penn, égrène de telles sornettes, le film nous montre une plaine américaine éclairée par les lueurs orangées d’un coucher de soleil, une chanson folk parachevant de nous convaincre d’entrée de jeu qu’on est en train de voir le pire film de la compétition. Une impression que les cent minutes suivantes ne feront malheureusement que confirmer.
„Flag Day“, un long et interminable flashback, commence avec une conversation entre une policière et Jennifer Vogel, à qui on expose le récent passé criminel du paternel, qui vient de décéder. S’ensuit le portrait que fait la fille-journaliste (le film s’appuie sur „Flim-Flam Man“, le livre que Jennifer Vogel a écrit sur son arnaqueur de père) d’un père-escroc, dont la spécialité était d’embobiner tout le monde, sa propre famille au premier chef.
Ce récit d’une désillusion – car la fille tombe d’abord sous le charme de cet homme toxique, ne veut pas croire sa mère qui pourtant l’avertit à plusieurs reprises quant à la véritable nature de cet homme – suit la classique dégringolade, avec ses moments de désespoir – Jennifer tombe dans la coke et la beuh – et d’espoir – elle croit pouvoir aider son père à remonter la pente et à mener une vie simple, mais honnête.
Croyant filmer le revers du rêve américain – car ce sont les attentes sociétales relatives au self-made man qui broient cet homme –, Sean Penn ne livre qu’un film aussi vide et creux que ce même rêve américain. L’ensemble des scènes sont téléphonées, convenues et on peine à adhérer à ce qu’on voit, tant les acteurs surjouent, tant les scènes sont mal écrites, mal filmées.
Au moins, tout s’accorde dans cette niaiserie pénible. Les filtres de la caméra, la folk, la voix off, le jeu des acteurs: tout s’enfonce et s’embourbe dans un mélo sirupeux, un voile de kitsch submergeant le film tout entier. Si Penn voulait filmer une Amérique rurale, authentique, il ne réussit qu’à reproduire des clichés, du toc, du faux.
A la fin de la séance presse, moult journalistes manifestèrent leur dédain en se marrant ostentatoirement. Alors qu’il n’y a rien de très drôle à ce qu’on vous vole deux heures du temps de vie qui vous est accordé en vous imposant un tel navet. Qu’un critique éminent comme Peter Bradshaw du Guardian, pour ne pas le nommer, ait gratifié cet indigeste gratin de quatre étoiles en dit plus sur le déclin d’un critique qu’autre chose.
„Flag Day“ de Sean Penn, en compétition, 0,5/5
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