100e anniversaire de la mort / Franz Kafka: L’écrivain de l’ambiguïté
Le célèbre écrivain praguois s’est définitivement retiré de la scène littéraire il y a 100 ans (3 juin 1924). Sa pérennité auctoriale et la survie de ses œuvres trouvent une illustration entre autres au Luxembourg: en collaboration avec le TNL (Théâtre national du Luxembourg) et le Théâtre des Casemates, l’Institut Pierre Werner (IPW) organise un petit festival Franz Kafka à l’occasion du centenaire de sa mort.
„Du bist gekommen und bleibst“ (Kafka)
Ainsi, le 3 juin 2024, l’actrice Corinna Harfouch, connue pour ses lectures magistrales en plus de ses rôles au théâtre et au cinéma, développera pour le TNL une nouvelle soirée avec des textes de Kafka, avec un accompagnement musical de Hannes Gwisdek. Dans la même perspective, une coproduction Mierscher Kulturhaus-Volkstheater Rostock propose, du 6 au 8 juin 2024, incluant des séances scolaires, une soirée littéraire centrée sur la lettre (que Kafka n’a jamais envoyée à son père) intitulée „Brief an den Vater“, avec le comédien Jan Jaroszek dans une mise en scène et des décors de Kay Wuschek. Une telle actualité mérite que l’on s’arrête sur cet écrivain tchèque d’expression allemande, connu notamment pour l’ambiance particulière de ses œuvres mêlant absurdité, réalisme et ambiguïté.
Né et élevé dans les mondes germano-judéo-tchèques de Prague, mort à Kierling près de Vienne, Franz Kafka est l’un des écrivains de langue allemande le plus important du XXe siècle, dont les œuvres, relevant de la critique sociale et du surréalisme, ont (eu) un impact international dans la mesure où les textes de Kafka, parsemés de relations opaques et de menaces, ont encore beaucoup à nous dire, surtout en ces temps où l’autoritarisme se rapproche de tous côtés. En outre, Kafka est un auteur transgénérationnel, car jeunes et moins jeunes se sentent également interpellés par les mondes qu’il a créés, dans lesquels l’individu est livré à des forces inconnues. Lorsque ce dernier écrivit „Du bist gekommen und bleibst“ („Tu es venu et tu resteras“) dans l’un de ses fragments de prose dans lequel il décrit avec une fine ironie une évocation des esprits, il ne se doutait qu’il anticipait la place qu’il occuperait dans le monde d’aujourd’hui. Ainsi, comment se fait-il qu’un écrivain qui a peu publié de son vivant („Das Urteil“, 1913; „Die Verwandlung“, 1915 ; „ In der Strafkolonie“, 1919; „Brief an den Vater“, 1919) et qui a travaillé à plein temps comme agent d’assurance devienne un phénomène mondial après sa mort? Et pourquoi cet homme et cet auteur, dont l’apparence sur les photos est d’une douceur insistante et d’une tristesse énigmatique, ne nous laissent-ils pas indifférents, même 100 ans après sa mort? Qu’est-ce qui rend les textes de Franz Kafka si uniques
Fascination pour Kafka
Ces derniers sont uniques dans la mesure où les protagonistes de Kafka ont la vie dure: ils se réveillent de rêves agités et se retrouvent transformés en vermine dans leur lit; ils sont accusés et conduits à l’échafaud sans savoir pourquoi. Un homme meurt à la porte après avoir attendu toute sa vie d’être admis. Un autre se noie dans la rivière parce que son père le lui a ordonné. Ainsi considérées, les figures kafkaïennes sont insérées dans des scénarios cauchemardesques, qui caractérisent l’œuvre de Kafka. Cet auteur les décrit avec la même distance froide d’un bureaucrate que celle qui anime souvent ses personnages. C’est précisément ce style, ce retrait par rapport à l’inouï, qui rendent les récits de Kafka insondables.
La vitalité des textes kafkaïens, qui se reflète également dans le nombre de traductions, a souvent été expliquée par le fait que des auteurs comme Kafka fournissent des images accrocheuses pour les expériences humaines fondamentales, qui se sont reconnues et comprises au-delà des frontières des époques et des cultures. Ainsi, il se peut que la toute-puissance du père, dont les conséquences mortelles sont décrites dans „Das Urteil“, ne soit plus considérée comme un problème dans toutes les régions du monde. Mais se sentir étranger au sein de sa propre famille („Die Verwandlung“) ou être rejeté par une communauté soudée uniquement parce que l’on ne connaît pas ses règles („Das Schloss“), sont des expériences plausibles dans n’importe quel contexte culturel et donc transmissibles par sa littérature. De plus, chez Kafka s’ajoute une autre dimension, au moins aussi importante pour sa popularité: il décrit un monde indiscutablement moderne qui a pris des traits inquiétants. L’expérience de la terreur totalitaire a conduit de nombreux lecteurs de la première génération à lire Kafka comme un prophète qui aurait prévu l’horreur du fascisme et du stalinisme, et au fond de n’importe quelle forme de totalitarisme ayant traversé son siècle et le nôtre.
Notons enfin qu’il n’y a pas d’autre auteur du XXe siècle qui ait attiré et inspiré autant d’illustrateurs et de peintres, de réalisateurs de films, de compositeurs, d’acteurs et d’hommes de théâtre. Dans la littérature mondiale, seul en effet un très petit nombre d’auteurs ont eu droit à une double vie posthume de ce type. Les œuvres de Kafka ne semblent pas vieillir: chaque nouvelle génération de lecteurs ressent l’impulsion de s’y confronter à nouveau, et le fait que les textes aient été depuis longtemps mesurés et creusés des centaines de fois en tant que champ de recherche universitaire n’y change rien.
Informations pratiques
Institut Pierre Werner/Théâtre national du Luxembourg
3/6/2024, 20.00 h
Mierscher Kulturhaus
Première: 7/6/2024, 20.00 h
Représentations scolaires:
6/6/2024, 10.00 h
7/6/2024, 10.00 h
Représentation:
8/6/2024, 20.00 h
- Was läuft am Wochenende? - 28. November 2024.
- EU-Parlament gibt grünes Licht für von der Leyens Kommission - 27. November 2024.
- Eine Person lebensgefährlich verletzt – Experten ermitteln, Straße bleibt noch gesperrt - 27. November 2024.
Sie müssen angemeldet sein um kommentieren zu können.
Melden sie sich an
Registrieren Sie sich kostenlos