Exposition / Il est parfois bon de tourner en rond: „Traces of time“ de Kay Walkowiak
La perception du temps est fortement influencée par la culture. Le temps peut être vu comme un cercle plutôt que comme une ligne. C’est ce que rappelle l’artiste autrichien Kay Walkowiak.
On comprend rapidement, en entrant dans l’espace d’exposition Waassertuerm+Pomhouse, ce qui a poussé le Centre national de l’audiovisuel à entrer dans une collaboration avec l’artiste autrichien Kay Walkowiak. L’institution comme l’artiste sont travaillés par le temps qui passe. Le travail de l’artiste rappelle à sa manière qu’il n’y a pas qu’une seule manière de le vivre, ni de le considérer. C’est ce qui avait marqué l’institution en découvrant l’installation qu’il avait, au printemps 2023, campée dans la salle des trésors du Bank Austria Kunstforum Wien.
Ce sont d’ailleurs ces œuvres qui accueillent le visiteur. L’ancienne station de pompage qu’est le Pomhouse, abrite en son centre une salle obscure, dans laquelle est diffusée la proposition la plus originale et aboutie de l’exposition „Traces of time“, pour ce qui est du rapport au temps. Le film, daté de 2021, donne son nom à l’exposition. C’est un film composé de soixante tranches d’une minute, soit à chaque fois un tour de cadran de l’aiguille des secondes, durant laquelle il filme en plan fixe une horloge et le mur sur lequel elle pend. Les prises ont lieu dans soixante magasins différents de villes d’Inde. Les horloges qu’il filme semblent le plus souvent remisées à l’arrière-plan, dans des parties de mur souvent délaissées. Elles sont un outil parmi d’autres, parmi des images religieuses et spirituelles, pour percevoir le monde.
Le temps et l’espace
Ce n’est pas que le temps, mais aussi l’espace qu’explore Kay Walkowiak. Ce sont des natures mortes qu’il nous donne à voir, augmentées du son que fait l’horloge, des musiques et des paroles qui sont produites hors champ. Il nous rappelle que le découpage du temps est une construction humaine, et que l’obsession de sa rationalisation est une invention occidentale qui, à la faveur de la globalisation, colonise le monde. Mais l’horloge, paradoxalement, symbolise aussi une vision cyclique du temps, qu’on associe plutôt à la pensée orientale, en rupture avec la perception catholique du temps comme d’une ligne.
Sur trois murs de la salle obscure, Kay Walkowiak poursuit sa démonstration. A l’entrée, dans trois photos grand format, il détourne des panneaux publicitaires des années 50, puisant dans les canons esthétiques pour renforcer l’efficacité de leurs messages. Ils véhiculent désormais un moment de réflexion sur le caractère éphémère de toute chose. „La recherche incessante de la satisfaction par la consommation est une tentative d’atténuer le sentiment de manque sous-jacent“, dit l’artiste, inspiré notamment par Lacan et Deleuze, pour inviter à une „reddition radicale“ à la nature éphémère de tout.
Au pied du château d’eau contigu, on découvre sa dernière production, réalisée en partenariat avec le CNA et le Musée national d’histoire de l’art et d’archéologie. Il s’agit de dix tirages, dans lesquels l’artiste autrichien joue avec la collection de céramiques du MNAHA et crée, par photomontage, un équilibre fragile sinon impossible. Et, au sommet, une œuvre circulaire qui réfléchit une nouvelle fois au temps qui passe et se répète. Comme une sorte d’hommage, le CNA a d’ailleurs décidé de faire un pas de côté et de mettre à l’honneur des clichés moins évidents que ceux qu’il a l’habitude d’exposer – des clichés qu’ailleurs, on considérerait comme ratés, et qui ici se chargent d’une poétique du temps qui passe.
Jusqu’au 25 novembre au Waassertuerm + Pomhouse à Dudelange.
So So Summer
Le CNA profite de l’exposition de Kay Walkowiak pour consacrer son programme estival „So So Summer“ au temps. Il a lieu chaque jeudi, de 17 à 22 h, jusqu’au 29 août, sur la terrasse du Pomhouse. Avec de la musique – The X (1er août), De Pascal vu Wooltz (15 août), Kev Heinen (22 août) et Sam Le Bien & Jay T. (29 août) –, de la nourriture, des animations culturelles et une after party à 22 h à la „Kantin“ voisine. Plus d’infos sur www.cna.lu.
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