Concert aux Rotondes / Sofi Paez, la contemplation faite musique – interview avec la pianiste et compositrice
Avec son premier LP, le grandiose „Silent Stories“, Sofi Paez s’impose en tant que virtuose du piano. Dans ses compositions contemplatives, l’harmonie de la nature côtoie les mélodies éblouissantes. Le son du piano ressemble à des vaguelettes qui s’entrelacent. A mi-chemin entre musique classique et pop, Sofi Paez crée, en fait, la musique de votre propre film mental. Elle est en concert ce samedi aux Rotondes dans le cadre des „Congés annulés“. Interview.
Tageblatt: Vous jouez du piano depuis l’enfance: quel est votre premier souvenir lié à cet instrument?
Sofi Paez: Je me souviens que j’étais très heureuse, quand j’étais petite, d’entendre le son qui émanait du piano de mon premier professeur. A chaque fois que je le voyais jouer, je trouvais que c’était fascinant, alors je lui demandais de me montrer, encore et encore; même, parfois, nous perdions du temps pendant les leçons, car je voulais l’écouter et le regarder jouer. Le regarder aussi, oui: j’aimais voir ses doigts se promener sur les notes. Je souhaitais qu’il joue pour moi, et je voulais réussir à faire pareil que lui. Jusqu’à atteindre une certaine dextérité.
Le clip „maison“ de „If I Could Do It All Again“ est illustré par une panoplie d’images de votre enfance et le morceau est dédié à votre famille.
En composant ce thème, j’ai ressenti une grande nostalgie de mon pays, le Costa Rica. Plus directement, des réminiscences de mon enfance ont rejailli. Comme j’ai retrouvé des bribes de vidéos un peu éparpillées, je les ai juxtaposées, car elles étaient à l’image de mes états d’âme.
Par rapport au titre de votre disque, „Silent Stories“, est-ce que vous considérez le piano comme un ami qui comprend vos états d’âme sans qu’il y ait besoin de lui parler?
C’est certain. Le piano est un élément constant de ma vie; il m’a accompagné, dans les bons moments comme dans les tourments. Le nom de l’album renvoie aussi à l’idée qu’un individu, quel qu’il soit, puisse ressentir des émotions, qui lui sont singulières, en écoutant un morceau instrumental, et ainsi y apposer sa propre histoire.
La musique sans paroles ouvre un grand champ des possibles.
Quand on marche dans la rue, on ne sait pas ce qu’il y a dans la tête d’un inconnu. Même quelqu’un qui nous connaît bien ne peut pas toujours percevoir, du moins entièrement, ce qu’il y a en nous. Ces moments d’évasion musicale possèdent l’avantage de pouvoir être repris pour soi-même. N’importe qui peut se réapproprier une chanson, qui plus est sans paroles; les mélodies laissent l’esprit se perdre, donc se balader.
En vous écoutant, on peut penser au classique, à l’ambient, à Brian Eno, à „Digital Shades“ de M83 ou à la bande-son de „La leçon de piano“. Mais vous, comment qualifieriez-vous votre musique?
C’est toujours très difficile de définir soi-même ce que l’on crée. Je suis, bien sûr, influencée par beaucoup de choses dans la vie; ce que je fais émane d’une fusion d’images et de sons. J’écoute énormément de pop, et en même temps, j’ai joué du classique, alors forcément, il y a ce mélange – le dénominateur commun, c’est le piano. Ma musique est instrumentale, ce qui, par définition, tort le schéma traditionnel, à savoir couplet/refrain/pont. Formulé comme cela, le geste peut sembler aller contre la notion de chanson, mais il n’empêche que j’aime la pop.
Cela s’entend, vous êtes autant une soundwriter qu’une songwriter: chez vous, l’expérimentation n’occulte jamais votre sens de la mélodie.
J’essaye!
Le piano est un élément constant de ma vie; il m’a accompagné, dans les bons moments comme dans les tourments. Le nom de l’album renvoie aussi à l’idée qu’un individu, quel qu’il soit, puisse ressentir des émotions, qui lui sont singulières, en écoutant un morceau instrumental, et ainsi y apposer sa propre histoire.
La nature, le vent, la pluie, les lacs, les arbres, les montagnes, tout cela est à la source de votre inspiration.
Absolument. Maintenant, c’est certain qu’en vivant à Berlin, je suis un peu dépaysée, car il n’y a pas beaucoup de montagnes! Mais oui, quand une personne écoute ma musique, j’espère qu’elle puisse ressentir le même type de sensations, si possible intenses, que si elle était face à un paysage agréable, ou devant un joli film.
Sur „New Beginnings“ on entend, par exemple, le chant des oiseaux, et vous utilisez votre voix comme un écho à votre piano, et même comme un instrument …
En effet, ma voix se glisse dans le morceau pour compléter ces superpositions. Je voulais expérimenter, mélanger le son du piano aux bruits de la nature, tout en y intercalant ma propre voix, comme un rappel.
Croyez-vous aux vertus thérapeuthique de la musique?
Je ne me suis pas trop interrogée là-dessus, mais j’y crois, oui. L’art de façon général s’avère thérapeutique pour soi, avant tout, car il sublime ce qui s’agite à l’intérieur. Et la force de la musique, justement, se trouve dans sa fonction communicative, directe; c’est un médium qui, par éclaboussures, peut être aussi une forme de thérapie pour qui la reçoit.
Même quand votre musique est instrumentale, est-ce que vous voulez faire passer un message?
Via ma musique, je veux que l’on puisse croire à l’espoir: au bout de l’obscurité, il y a la lumière. C’est ce que – je l’espère – ma musique génère.
En tant que lieu clos et en tant que petit espace, une salle de concert représente l’exact contraire de ces paysages qui s’étendent à perte de vue, par extension à l’amplitude de votre musique.
Je pense que le fait qu’une salle de concert soit fermée permet de déployer cette amplitude, paradoxalement. Cela amène une certaine vulnérabilité. C’est très bien ainsi. Je n’aime pas que tout soit rôdé, voire parfait, pendant un concert. Au contraire, j’ai envie de me connecter avec l’artiste et sentir sa fragilité. Son humanité.
Quel genre de futur musical imaginez-vous pour Sofi Paez?
Oh, déjà, j’aimerais pouvoir enregistrer un second disque. Jouer au Costa Rica, aussi. Et puisque l’on parle d’images, je me verrais bien réaliser de la musique pour un film. Récemment, j’ai un coup de cœur pour „Aftersun“ de Charlotte Wells: la photo du film est splendide. Et, dans un futur plus proche, j’ai hâte de jouer au Luxembourg.
En concert
Ce samedi 27 juillet à 20.30 h aux Rotondes à Luxembourg-ville
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