Expo au Centre Pompidou Paris / Surréalisme 1924-2024: l’exposition du centenaire, histoire d’une révolution
Une expo comme cadeau d’anniversaire: „Surréalisme 1924-2024: l’exposition du centenaire“ au Centre Pompidou à Paris célèbre le centenaire d’un mouvement artistique révolutionnaire.
Belle idée, par les temps qui courent, de proposer une exposition anniversaire sur ce mouvement qui perdure et continue d’influencer nombre d’artistes, le surréalisme. Onirisme, inconscient à l’œuvre, contre le progrès d’une société aveugle, le surréalisme est le manifeste de la puissance de l’homme dans tout son mystère.
Perte des repères rationnels et par trop quotidiens d’un homme voué à une aliénation certaine, le surréalisme, en effet, prône les vertus de l’inconscient, et tente de déjouer la trajectoire d’existences vouées à la société de consommation: par l’écriture automatique, des collages, des cadavres exquis, des écrits et des images, des espaces mentaux ouverts comme autant d’intervalles insoupçonnés. Détournement incessant du réel, exaltation de l’amour comme passion noble, jusqu’au délire de sa vérité, érotisme, pulsions de l’inconscient, avec Sade, Bataille, toutes les échappées ici deviennent vertueuses. Cette exposition permet de faire découvrir aux jeunes générations un socle fondamental de l’art, ouvert au champ du politique, engagé dans son temps. Un temps encore d’actualité, ce mouvement apparaissant comme universel, aux enjeux sans cesse renouvelés.
Un labyrinthe de sensations
Les surréalistes aimaient les marchés aux puces, pour l’agencement hétéroclite et hasardeux des objets, les fêtes foraines, et particulièrement les trains fantômes. Dans cet état d’esprit, afin de nous délester du quotidien, l’exposition s’ouvre par une boîte magique. Nous sommes d’emblée immergés dans un monde onirique. Dans ce labyrinthe de sensations, de liens entre divers supports, films, peintures, écrits, collages, nous arrivons peu à peu à la salle centrale et découvrons le „Manifeste du surréalisme“, document original de 1924, qui rassemble, entre autres, les principes clés de ce mouvement. Un hommage à l’imagination, un désir d’émerveillement, la résolution du conflit entre le rêve et la réalité – en cela les surréalistes seront friands du monde médiumnique, des gestes de l’inconscient – la pratique de l’écriture automatique. La découverte d’un auteur oublié, mort en 1870, Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, fascine les surréalistes par l’aspect débridé et apparemment sans logique de ses écrits. Lautréamont prône la violence, en réponse à la société – ce qui est un cri de ralliement pour les surréalistes, au sortir de la guerre. Absurdité d’un monde, auquel répond cette célèbre phrase de Lautréamont, qui devient une devise surréaliste: „Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie.“
Placé, donc, sous le triple signe de la liberté, de l’amour et de la poésie, le surréalisme naît dans les années 1920. André Breton, Louis Aragon, Philippe Soupault, Paul Eluard, créent „Littérature“. Ils s’éloignent du mouvement Dada, trop nihiliste à leur goût. Ainsi s’organise peu à peu le désir d’une provocation mêlé au merveilleux, le merveilleux désignant ici tout ce qui surprend par la nouveauté, l’inattendu, le plaisir que l’on prend à être surpris. Outre Lautréamont, Freud, Gustave Moreau et Bosch sont des phares dans leurs recherches. Breton réunit tous ceux qui désirent ignorer l’ordre et la raison. Découvreur de textes, le surréalisme se veut dans la continuité du romantisme et du symbolisme. „L’art, écrit Breton, est au service de la révolution.“ Écriture automatique, cadavres exquis, collages, tout est prétexte à la fuite, et génère une créativité folle.
Mais André Breton se veut tout-puissant et commence, dans les années 30, à excommunier ceux qui dérivent de la ligne dure du surréalisme. Georges Bataille dénonce son idéalisme. Ensuite vient la politique, et là où il semblait engagé, le surréalisme, en la personne de Breton, refuse d’être assimilé au marxisme. Vision qu’il considère réductrice, pour un art majeur. Breton rompt avec certains de ses amis, ainsi qu’avec le parti communiste.
L’intervalle où plonger
L’enfance est également convoquée, avec Alice, le personnage emblématique d’un monde à la renverse, la petite Alice de Lewis Carroll. André Breton considère Lewis Carroll comme un ancêtre du surréalisme. Il écrit à son propos: „Tous ceux qui gardent le sens de la révolte reconnaîtront en Lewis Carroll leur premier maître d’école buissonnière.“ Réinventer le monde passe par des espaces enchanteurs comme le labyrinthe, la fête foraine, la forêt. Celle-ci, lieu initiatique, devient l’un des sujets de prédilection. La dérive urbaine a également le pouvoir de transformer la ville en un autre lieu, plus magique, surtout quand elle est nocturne. Le photographe Brassaï métamorphose la cité en un labyrinthe inquiétant et merveilleux à la fois. Notons que l’Exposition internationale du surréalisme, organisée en 1938 à Paris, à la Galerie des beaux-arts, a été plongé dans l’obscurité. Cette obscurité qui efface les contours d’une réalité trop bien dessinée.
L’érotisme est également de la partie, comme une exploration des pulsions qui forgent l’être humain. Il n’est qu’à penser à Sade, et à Annie Le Brun, qui nous a quitté dernièrement, une spécialiste de l’ombre et des écrits de Sade, cet abîme qui soudain s’ouvre devant nous. C’est cet intervalle, effectivement, où plonger, qui force l’art, l’oblige, en fait nécessité et non anecdote, imagerie. Comme cette volonté de replacer l’homme entre ciel et terre, de le faire entrer en résonance avec le cosmos, de retrouver, à la façon du Moyen Âge, une correspondance entre celui-ci et la nature – que l’on pense par exemple à la correspondance entre l’intérieur d’une noix et le cerveau humain. Tout est lié par des forces qui nous dépassent, et cet univers infini, les surréalistes l’explorent avec jubilation.
En cela, il s’agit d’un acte politique, s’évader de ce qui est quadrillé et trop clair, pour côtoyer ce qui est fondamental et se perd au quotidien, le rêve, l’imaginaire, la créativité. Une façon au moins d’oxygéner des pans de vie.
Cette exposition a le mérite de convoquer une utopie ancienne. Car les artistes réunis derrière un manifeste et qui ont une intention commune n’existent plus. L’idée de collectif a disparu au profit des réseaux sociaux. Une exposition salutaire!
Infos
Surréalisme, 1924-2024: l’exposition du centenaire
Jusqu’au 13 janvier 2025
Centre Pompidou
centrepompidou.fr
Le parcours
Cette exposition itinérante prendra le chemin de diverses villes dans le monde, enrichie alors du surréalisme tel qu’il était vécu dans ces lieux.
Du 21 février au 21 juillet 2024: Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique à Bruxelles
Du 4 février au 11 mai 2025: Fundación MAPFRE à Madrid, Espagne
Du 12 juin au 2 octobre 2025: Kunsthalle de Hambourg, Allemagne
Fin 2025, début 2026: Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, Etats-Unis
- Das erwarten sich die Redakteure und die Winzerin vom neuen Projekt - 20. November 2024.
- Vom Ehemann betäubt, von Fremden vergewaltigt: Opfer sagt erstmals vor Gericht aus - 20. November 2024.
- Bauern protestieren weiter gegen Mercosur-Abkommen - 20. November 2024.
Sie müssen angemeldet sein um kommentieren zu können.
Melden sie sich an
Registrieren Sie sich kostenlos