France / Le moral du camp Macron accuse sévèrement le coup de la dissolution
La campagne des législatives pose, parmi de nombreuses autres questions, celle de savoir qui, en cas de victoire du Rassemblement national ou du Nouveau Front populaire, s’installerait à Matignon pour diriger le gouvernement. Mais elle donne aussi l’occasion aux observateurs de scruter les états d’âme du chef de l’Etat et de ce qu’il lui reste de supporters.
Sur le premier point, Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a indiqué hier qu’il n’accepterait cette fonction, à laquelle il a été désigné par son parti si ce dernier remportait les élections des 30 juin et 7 juillet, que s’il disposait d’une majorité absolue dans la nouvelle Assemblée nationale; hypothèse qui ne peut certes pas être exclue à ce stade, mais n’est pas assurée pour autant. Faute de quoi, dit-il – non sans raison sans doute, d’ailleurs – il ne serait pas en mesure de gouverner, surtout en cohabitation avec le président Macron.
A gauche, on n’affiche pas de telles précautions oratoires; mais le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, toujours soucieux d’écarter de ce poste le patron de LFI Jean-Luc Mélenchon, désormais perçu comme un véritable repoussoir par la gauche modérée, demande que le futur chef du gouvernement soit désigné, toujours en cas de victoire, par un vote des élus du Nouveau Front populaire.
Les constitutionnalistes pointilleux pourront d’ailleurs objecter à l’un comme à l’autre que c’est au président de la République, et à lui seul, qu’il revient de nommer le premier ministre – quitte, pour les parlementaires, à lui refuser ensuite leur confiance. Il est vrai que le chef de l’Etat, pour l’instant, n’est manifestement pas tenté de mettre en avant cette prérogative, et que l’état d’esprit de son camp, jusqu’aux couloirs de l’Elysée, semble plus morne et abattu que jamais.
„Il nous a sacrifiés“
Bien sûr, toutes les familles politiques ont été prises de court, et comme abasourdies, par la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre immédiatement l’Assemblée nationale, moins d’une heure après la proclamation, dimanche 9 juin, des résultats des élections européennes. Des résultats en effet calamiteux pour sa „majorité“, les guillemets s’imposant plus que jamais, et au contraire redoutablement favorables au Rassemblement national du tandem Le Pen/Bardella; mais qui n’avaient vraiment rien d’inattendu au vu des sondages. A l’évidence, la décision du président de la République était donc déjà prise depuis un moment déjà.
Mais dans ce climat de surprise générale, c’est très clairement au sein du camp macroniste qu’elle a retenti le plus fort, et surtout le plus douloureusement. A bavarder avec des élus de Renaissance ou d’autres formations appartenant à la même mouvance, on perçoit non seulement une très grande incompréhension, mais même une vraie colère, certains osant même parler d’une „haine qui suinte“. „Il nous a sacrifiés au profit d’un caprice personnel“, dit l’un. „Nous nous sommes donnés à fond, et pour nous récompenser, il nous envoie au massacre électoral, il nous prend pour sa chair à canon“, dit l’autre. Quant à la présidente de l’Assemblée dissoute, Yaël Braun-Pivet, elle a même hésité, toute macroniste qu’elle ait été, à se représenter: „J’avais envie de tout lâcher, d’en finir avec la politique.“ Plusieurs ministres sont aussi dans ce cas.
Des détails de la campagne sont éloquents. Ainsi la plupart des candidats que l’on hésite encore à qualifier de „macronistes“ refusent de faire figurer sur leurs affiches et leurs professions de foi envoyées aux électeurs le portrait du locataire de l’Elysée: c’est plutôt celui du premier ministre lui aussi sortant, Gabriel Attal, qui prime. Attal qui s’est ainsi fait apostropher sur un marché de sa circonscription par un sympathisant: „Vous, on vous aime bien, pas de problème; mais par pitié, dites à Macron de fermer sa gueule!“ Ambiance …
Le grand „sauve-qui-peut“
Dans les cabinets ministériels, et même dans les bureaux de l’Elysée, comme chez les assistants parlementaires de l’ex-majorité relative, c’est le grand sauve-qui-peut, la fuite éperdue vers des postes du secteur privé. Certes, ce n’est évidemment pas la première fois que des hommes et des femmes de pouvoir, de droite comme de gauche, sentent que ce dernier va changer de mains à la suite d’élections législatives à venir, et cherchent par avance à se recaser dans d’autres aventures professionnelles. Mais c’est la première fois qu’ils se sentent à ce point victime d’un suicide politique délibéré de la part de leur chef, empêtré peut-être dans des rêveries machiavéliques que rien ne semble devoir confirmer pourtant, ou des réflexes d’enfant gâté de la politique qui, comme le dit l’un de ses ministres, „a décidé de casser ses jouets“.
Reste à savoir si les urnes confirment le 7 juillet les pronostics dressés par les uns et les autres sur la base des sondages, quel pourrait tout de même être l’avenir du macronisme, auquel son fondateur – et de plus en plus rares collaborateurs autour de lui – semblent encore vouloir croire. Car après tout, même humilié à nouveau (et à sa propre initiative!) par des législatives qui vont certainement conforter, et pourraient même installer au pouvoir, ces „extrêmes“ contre lesquels se proposait au contraire de constituer un rempart, le chef de l’Etat a encore trois années devant lui avant de devoir passer la main, constitutionnellement.
Trouvera-t-il soudain – mais après quelles nouvelles épreuves, voire quels drames, et avec qui ? – les voies et moyens de sauver, ou plutôt de ressusciter, si les deux extrémismes se déchirent et/ou se paralysent mutuellement, ce centrisme de l’„en même temps“, de la droite et de la gauche toutes deux modérées, sur la base duquel il avait si bien su séduire les Français? C’était, il est vrai, il y a sept ans. Autant dire un siècle.
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